Charles, par la grace de Dieu roy de France, à tous presens et advenir [,
salut]aBEOmis. Nostre
intention a tousjours esté et est, à l’exemple de noz predecesseurs, de regir
et gouverner nostre royaume et recevoir de noz subjetz l’obeïssance qui nous
est deue plustost par doulceur et voie amiable que par force. Au moien de quoy,
aiant nostre tres cher et tres amé bon frere le roy de Pollongne entiere
congnoissance de nostre voulloir, a, suivant noz mandemens et le pouvoir
special que nous luy avons envoyé à ceste fin, commis et depputé aucuns des
principaulx personnages de nostre Conseil privé estans pres de luy pour oÿr et
entendre les plaintes, dolleances et supplications des maire, eschevins, pairs,
conseilliers, manans et habitans de nostre ville de La Rochelle, gentilzhommes
et autres qui s’i sont retirez. Et comme ainsi soit qu’en fin nostre tres cher
et tres amé bon frere le roy de Pollongne ait soubz nostre bon plaisir accordé,
par l’advis de noz tres chers et tres amez freres les duc d’Alençon et roy de
Navarre, de noz tres chers et bien amez cousins les prince de Condé et prince
daulphin, ducz de Longueville, de Guise, de Nevers et d’Uzés, seigneurs de
Montluc, conte de Retz, de Biron, de Villequier, de La Chappelle aux Ursins, de
Losses, de La Vauguion, de Sainct-Suplice, de Malicorne, de Suze, grand prieur
de Champaigne et autres grans et noapps personnages estans pres de luy, ausd.
de La Rochelle, gentilhommes et autres retirez en icelle, les poinctz et
articles qui seront cy aprés speciffiez, tant pour eulx comme pour les habitans
de noz villes de Montauban et Nismes, gentilzhommes et autres retirez en
icelles et aucuns autres noz subjectz pour lesquels ilz ont supplié, sçavoir
faisons que nous, considerans que ne pourrions mieulx faire que d’ensuivre le
conseil qui nous est donné par nosd. freres, princes et seigneurs dessusd.,
lesquelz, pour le zelle qu’ilz ont à l’honneur de Dieu avec l’experience des
choses et l’affection qu’ilz portent au bien de noz affaires, ont plus de
congnoissance que nulz autres de ce qu’il faict besoing et est necessaire pour
le bien de nostre royaume, avons, par l’advis et bon conseil de la royne nostre
tres honnorée dame et mere, de noz tres chers et amez cousins les cardinaulx de
Lorraine et de Guise, de nostre tres cher et feal chancelier, des srs de Morvillier, de Lanssac, de Limoges, les presidens
premier de Thou et Seguier2, sr de Foix, president Hennequin, srs de Cheverny,
de Mande et de Roessy, tous conseilliers respectivement en nostred. Conseil
privé, pour les causes et raisons dessusd. et autres bonnes et grandes
considerations à ce nous mouvans, dict, declaré, statué et ordonné, disons,
statuons et declarons par cestuy nostre present eedict perpetuel et
irrevocable, voulons et nous plaist ce qui s’ensuict :
2 C’est-à-dire : le premier président [du
Parlement] de Thou et le président Séguier.
I, 20
En defendant à nostre tres cher et feal chancellier et à noz amez et feaulx les
maistres des requestes ordinaires de nostre hostel tenans les seaulx de noz
chancelleries de ne bailler aucuns reliefz d’appel, et à noz courtz de
parlement de ne les tenir pour bien relevez, ne autrement empescher la
congnoissance de nosd. officiers inferieurs oud. cas de sedition, attendu la
perilleuse consequence et ce qu’il est besoing y donner de prompte provision et
exemplaire punition.
IX, 16
L’examen desquels presidens et conseillers nouvellement erigez sera fait au
Conseil privé de Sa Majesté ou par lesd. chambres, chacun en son detroit, quand
elles seront en nombre suffisant ; et neantmoins le serment accoustumé sera par
eux presté es cours où lesd. chambres seront establies, excepté ceux de lad.
chambre de Languedoc, lesquels presteront le serment es mains de Monsieur le
chancelier, ou en icelle chambre quand elle sera establie.
Et pour obvier à tous differendz qui pourroient intervenirdsurvenir E entre les courtz de parlement et les
chambres d’icelles courtz ordonnées par iceluy edict, le roy fera au plus tost
ung bon et ample reiglement entre lesd. courtz de parlement et lesd. chambres,
et tel que ceulx de lad. Religion pretendue reformée joÿront entierement dud.
eedict. Sera promptement passé oultre à l’establissement de la chambre de
Languedoc suivant iceluy edict ; mais s’il se voit cy aprés que le nombre des
juges n’y soit suffisant pour l’affluence des causes, presentans lesd. de la
Religion requeste à Sa Majesté, leur sera pourveu suffisamment. Pour le regard
des gens du roy, seront suiviz les articles secretz de l’an mil cinq cens
soixante dix sept, tant pour le regard de la chambre de Languedoc que de celle
de Guienne. Neantmoins lesd. gens du roy en ceste charge seront continuez sans
pouvoir estre revocquez, sinon es cas de l’ordonnance, combien qu’ilz portent
tiltres de substitutz d’advocatz et procureurs generaulx esd. courtz de
parlement. Les commis des greffiers civil et criminel esd. chambres exerceront
leur charge par commission du roy, et seront appellez commis au greffeeaux greffes E civil et criminel. Et
partant ne pourront estre destituez ny revocquez par lesd. greffiers des
parlementz ; touteffois seront tenuz rendre l’emolument desd. greffes ausd.
greffiers, lesquelz commis seront salariez par lesd. greffiers selon qu’il sera
advisé et arbitré par lesd. chambres. Et quant aux huissiers, oultre ceulx qui
seront prins esd. parlementz, lesquelz seront catholicques, en seront erigez de
nouveau deux en chacune chambre, qui seront de lad. Religion ; et seront tous
lesd. huissiers reglez par lesd. chambres tant en l’exercice et departement de
leurs charges que es esmolumentz qu’ilz debvront prendre. Seront aussi, es
villes où lesd. chambres seront erigées, deux offices de sergentz, pour estre
tenuz par personnes de lad. Religion. Et quant aux procureurs, est permis aux
procureurs desd. parlementz d’aller postuller esd. chambres. Et en cas que le
nombre ne fust suffisant, en sera erigé par le roy, et pourveu gratuitement à
la nomination desd. chambres, tel nombre qu’elles adviseront pourveu qu’il
n’excede dix, et dont elles envoyront le roolle, sur lequel seront faictes et
scellées les provisions. Les expeditions de chancellerie desd. chambres se
feront en presence de deux conseilliers d’icelles chambres, dont l’un sera
catholicque et l’autre de lad. Religion pretendue refformée ; en l’absence d’un
des maistres des requestes de l’hostel du roy, l’un des notaires et secretaires
desd. courtz de parlementz fera residence es lieux desd. chambres, ou bien ung
des secretaires ordinaires de la chancellerie, pour signer les expeditions de
lad. chancellerie. Et a esté arresté que la chambre de Languedoc sera establie
en la ville de L’Isle en Albigeois.
Sur les chambres de Languedoc et de Guyenne, IX.11.
Sur les commis et greffiers, IX.18, XII.40.
Sur les huissiers, IX.19.
Sur la création d'un réglement, IX.15, XII.63.
Le roy, pour ne laisser aucune occasion ne dissentionsgoccasions de dissensions E qui puissent alterer le repos
entre ses subjectz, ordonne que tout ce qui est advenu depuis la publication
dud. dernier eedict jusques à huy contre et au prejudice d’iceluy edict, d’une
part et d’autre, sera et demeurera estainct et assopy comme non advenu. Et ne
sera aucun recerché pour raison des assemblées de gens de guerre faictes dedans
les villes ou aux champs, establissement ou entretenement des garnisons,
entreprises et saisies des villes, places, chasteaux et maisons, meurtres,
emprisonnementz, rançons ne autres excez en ce survenuz, ne pareillement des
ruynes des temples, maisons et edifices des ecclesiasticques et autres, dont
sesd. subjectz d’une part et d’autre seront et demoureront quictes et dechargez
; et ne sera permis aux procureurs generaulx de Sa Majesté, ne autres personnes
quelzconques, publicques ny privez, en quelque temps ny pour quelque occasion
que ce soit, d’en faire poursuitte en quelque court ou jurisdiction ne en
aucune maniere que ce puisse estre, le tout en la mesme forme et maniere qu’il
est porté par l’article cinquante cinqiesme dud. dernier eedict de
paciffication, excepté les ravissementz des femmes et filles, bruslemens,
volleries, meurtres faictz par prodition, et de guet apens hors les voies
d’hostilité, ou pour exercer vengeance particuliere, et autres crimes et
delictz reservez par led. dernier eedict de paciffication, lesquelz pourront
estre poursuiviz par les voies de justice, et d’iceulx estre faict la punition
tel que les cas le requerront. Et pour le regard des deniers prins, tant des
finances du roy que des villes, communaultez et autres particuliers, et ceulx
aussi qui ont esté imposez et cueilliz, de quelque sorte et nature de deniers
que ce soit, et en quelque maniere qu’ilz ayent esté levez par lesd. de la
Religion, et autres qui ont tenu leur party, depuis led. edict de
paciffication, en sont et demeurent entierement deschargez, sans qu’ilz en
puissent, ne ceulx qui l’auront commandé, corps de villes et communaultez, ny
aussi leurs commis, estre aucunement recerchez. Seront neantmoins lesd. de la
Religion tenuz s’assembler avec les communaultez des villes et faire ung estat
au vray en commun dedans le dernier jour d’avril prochain pour tous delaiz,
tant en recepte que despence, jusques à huy, lequel estat ilz seront tenuz de
signer et affermer tous conjoinctement, et iceluy mectre es mains, dedans led.
temps de deux mois, de ceulx qui sont ordonnez pour executer led. eedict de
paciffication en Languedoc, affin que sur led. estat les chambres des comptes
passent en recepte et allouent en despence ce qui sera contenu aud. estat, et
non davantaige. Et afin de reprimer l’insolence de plusieurs, et empescher ces
maulx à l’advenir, le roy declare que cy aprés il ne donnera aucune abolition
ny grace des susd. et semblables contraventions à l’edict, et faict deffenses à
son chancellier ou garde des seaulx de les sceller, et à tous juges d’y avoir
egard en quelque façon que ce soit. Et si aucuns de ceulx à qui la presente
grace est faicte retomboient en mesme faulte, seront non seullement pugniz pour
lad. nouvelle faulte, mais aussi seront privez et decheuz du fruict et benefice
qui leur est accordé par cest article.
Et pour ce faire seront tenuz les gentilzhommes et les habitans des villes,
tant d’une Religion que d’autre, d’accompaigner les gouverneurs et lieutenans
generaulx du roy, et les ayder de leurs personnes et moiens, si besoing est et
en sont requis, pour faire reparer incontinant lesd. attentatz. Seront tenuz
lesd. gouverneurs et lieutenans generaulx, ensemble les bailliz et seneschaulx,
s’y emploier vifvement sans aucune remise, delay ny excuse, et y aporter toute
diligence et moiens à eulx possibles pour la reparation desd. attemptatz et
punition des coulpables par les peines portées en l’edict. Et oultre a esté
aussi resolu que ceulx qui feront entreprinses sur villes, places et
chasteaulx, ou qui leur donneront ayde, assistance, faveur ou conseil, ou qui
commectront aucun attemptat contre et au prejudice de l’edict et de tout ce que
dessus, pareillement ceulx qui n’obeïront, et resisteront par eulx ou par
aultruy directement ou indirectement à l’effect et execution dud. eedict de
paciffication et de tout ce que dessus, sont dès à present declarez criminelz
de leze majesté, eulx et leur posterité infames et inhabilles à jamais de tous
honneurs, charges, dignitez et successions, et encouruz en toutes les peines
portées par les loix contre les criminelz de leze majesté au premier chef ;
declarant en oultre Sa Majesté qu’elle n’en donnera aucune grace, deffendant à
ses secretaires1 de les
signer, à son chancellier ou garde des sceaulx d’en sceller et aux courtz de
parlementz d’y avoir egard à l’advenir, quelques exprés et reïterez mandemens
qui leur en puissent estre faictz.
1 Les secrétaires du roi, officiers de chancellerie
chargés de dresser et de signer les lettres patentes, notamment les lettres
de grâce en matière criminelle dont il est ici question.
XII, 48
Les recusations qui seront proposées contre les presidens et conseillers des
chambres mi parties pourront estre jugées au nombre de six, auquel nombre les
parties seront tenues de se restraindre ; aultrement sera passé oultre, sans
avoir esgard ausd. recusations.
Permet Sad. Majesté à ceux de lad. Religion eux assembler par devant le juge
royal, et par son authorité egaler et lever sur eux telle somme de deniers
qu’il sera arbitré estre necessaire pour estre employez pour les fraiz de leurs
synodes et entretenemens de ceux qui ont charges pour l’exercice de leurd.
Religion, dont on baillera l’estat aud. juge royal pour iceluy garder, la
coppie duquel estat sera envoyée par led. juge royal de six en six mois à Sad.
Majesté ou à son chancelier ; et seront les taxes et impositions desd. deniers
executoires nonobstant oppositions ou appellations quelconques.